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Claude Estèbe

Uchimata

Hôtel de la Paix, Angkor Photo Festival
Siem Reap, Cambodge
25 novembre – 18 décembre 2006
Commissaire d’exposition

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Biographie

Après un doctorat à l’INALCO sur la photographie au Japon, Claude Estèbe est  chercheur associé en histoire visuelle au LHIVIC/EHESS. Japonologue et photographe, son œuvre questionne la séduction, le corps culturel et ses invariants autour des  mythologies de la subculture. Résident à la Villa Kujoyama en 2000 et lauréat de la Bourse Louis Roederer/BNF en 2007, il a publié  Les Derniers samouraïs (éditions Marval, 2001) et Le Crépuscule des Geishas (éditions Marval, 2002).

L’idée de ce thème remonte à 1994. Cette année là, lors d’un séjour à Kyoto, Michel Wasserman m’a présenté Susan Buirge, qui cherchait un photographe pour suivre la création de de sa nouvelle chorégraphie avec les sept danseurs japonais de sa troupe, Matoma, créée lors de son séjour à la Villa Kujoyama. Cette expérience passionnante m’a donné envie de faire une série sur les postures spécifiques à la société japonaise que j’avais remarquées en vivant avec les danseurs. En 2000, j’ai l’occasion de revenir quelques mois au Japon, lors d’un séjour à la Villa Kujôyama à Kyoto comme résident. Tout en travaillant sur deux livres, Les Derniers Samouraïs et Les Crépuscules des geishas, j’avais remarqué que les postures qui m’avaient intriguées. Le rapport au sol, une manière de marcher, de se tenir debout ou de s’asseoir sur un tatami si différente de la nôtre, la fermeture du corps vers l’intérieur mais également une grande “fluidité” des corps chez les danseurs et au quotidien, existaient déjà dans les estampes ukiyo-e de l’époque Edo et sur les premières photographies de geisha et d’oiran. En flânant sur Kawaramachi, je commençais à repérer des éléments syntaxiques de ce langage des jambes dont l’équilibre dynamique joue avec une signalétique des sols prolixe et colorée. La rigueur légendaire des attitudes sociales nippones semble fondre en se rapprochant du sol. Les jambes des Japonaises en discussion effectuent de lents ballets d’une grande fluidité. Aux feux, elles s’immobilisent dans des postures d’une élasticité inaccessible aux corps occidentaux pétrifiés par l’usage intensif des chaises. Les poses sont socialement codifiées. Uchimata — les pieds en dedans — est une pose féminine essentielle, liée au kimono, codifiée, sublimée dans le style nihonga et toujours d’actualité dans les looks kawaii des mangas. Même les gyaru de Shibuya qui détournent les codes esthétiques de l’archipel ont conservé jusqu’à la caricature l’uchimata. Elles marchent aussi précautionneusement en mini-jupe que des oirans du Yoshiwara entravées de lourds kimonos. Les modes changent frénétiquement mais la démarche survit depuis 200 ans, comme un invariant culturel intériorisé.

Claude Estèbe

Biographie

Après un doctorat à l’INALCO sur la photographie au Japon, Claude Estèbe est  chercheur associé en histoire visuelle au LHIVIC/EHESS. Japonologue et photographe, son œuvre questionne la séduction, le corps culturel et ses invariants autour des  mythologies de la subculture. Résident à la Villa Kujoyama en 2000 et lauréat de la Bourse Louis Roederer/BNF en 2007, il a publié  Les Derniers samouraïs (éditions Marval, 2001) et Le Crépuscule des Geishas (éditions Marval, 2002).

L’idée de ce thème remonte à 1994. Cette année là, lors d’un séjour à Kyoto, Michel Wasserman m’a présenté Susan Buirge, qui cherchait un photographe pour suivre la création de de sa nouvelle chorégraphie avec les sept danseurs japonais de sa troupe, Matoma, créée lors de son séjour à la Villa Kujoyama. Cette expérience passionnante m’a donné envie de faire une série sur les postures spécifiques à la société japonaise que j’avais remarquées en vivant avec les danseurs. En 2000, j’ai l’occasion de revenir quelques mois au Japon, lors d’un séjour à la Villa Kujôyama à Kyoto comme résident. Tout en travaillant sur deux livres, Les Derniers Samouraïs et Les Crépuscules des geishas, j’avais remarqué que les postures qui m’avaient intriguées. Le rapport au sol, une manière de marcher, de se tenir debout ou de s’asseoir sur un tatami si différente de la nôtre, la fermeture du corps vers l’intérieur mais également une grande “fluidité” des corps chez les danseurs et au quotidien, existaient déjà dans les estampes ukiyo-e de l’époque Edo et sur les premières photographies de geisha et d’oiran. En flânant sur Kawaramachi, je commençais à repérer des éléments syntaxiques de ce langage des jambes dont l’équilibre dynamique joue avec une signalétique des sols prolixe et colorée. La rigueur légendaire des attitudes sociales nippones semble fondre en se rapprochant du sol. Les jambes des Japonaises en discussion effectuent de lents ballets d’une grande fluidité. Aux feux, elles s’immobilisent dans des postures d’une élasticité inaccessible aux corps occidentaux pétrifiés par l’usage intensif des chaises. Les poses sont socialement codifiées. Uchimata — les pieds en dedans — est une pose féminine essentielle, liée au kimono, codifiée, sublimée dans le style nihonga et toujours d’actualité dans les looks kawaii des mangas. Même les gyaru de Shibuya qui détournent les codes esthétiques de l’archipel ont conservé jusqu’à la caricature l’uchimata. Elles marchent aussi précautionneusement en mini-jupe que des oirans du Yoshiwara entravées de lourds kimonos. Les modes changent frénétiquement mais la démarche survit depuis 200 ans, comme un invariant culturel intériorisé.

Claude Estèbe

© Claude Estèbe  tous droits réservés mentions légales
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